La bijouterie éthique existe-t-elle vraiment ?
Scandale dans l’univers de la bijouterie : la marque Lou.Yetu se proclamant “éthique” est notamment accusée de marketing mensonger. Une question se pose alors : comment savoir si une marque de bijouterie est vraiment éthique ? Ces accessoires fabriqués à partir de matières premières rares sont soumis à de nombreuses controverses. Avec Pierre et Fanny de Diamantissimo, on va répondre à cette question afin que vous ayez tous les éléments pour reconnaître ce qui fait l’éthique d’une bijouterie… ou non.
Temps de lecture : 20 minutes.
S’il y a un bien un secteur de mode dans lequel je n’y connaissais rien, c’est la bijouterie. Pas étonnant cela dit, parce que la transparence n’est pas de mise. Comme pour beaucoup de secteurs, il faut aller creuser… Vraiment très loin.
Dans le cadre de cet article, j’ai rencontré Pierre et Fanny, un couple engagé pour une meilleure transparence de la bijouterie. Ils sont propriétaires de la bijouterie familiale de Pierre, créée dans les années 20 par son arrière-grand-mère : Diamantissimo, dont je parlerai à la fin de cet article.
Pour reprendre les bases, on va d’abord faire en sorte de mieux comprendre le secteur de la bijouterie.
La joaillerie fine et la fantaisie
Quand on parle de bijouterie, on parle finalement de deux types de bijoux : la joaillerie fine et la fantaisie. Ces deux catégories sont intéressantes à différencier puisqu’elles n’ont pas du tout le même but et n’emploient pas les mêmes techniques.
La joaillerie fine : miser sur la durabilité
La “joaillerie” vient du mot “joyaux” et concerne la réalisation de bijoux avec des pierres. Mais sans les métaux précieux comme l’or, l’argent ou encore le platine, nul ne peut réaliser un tel bijou ! La bijouterie, c’est le travail du métal. C’est pourquoi une marque comme Diamantissimo se nommera “bijouterie-joaillerie”. Les bijoutiers en joaillerie fine travaillent directement avec le produit fini.
L’avantage considérable de la joaillerie fine, c’est que les bijoux peuvent être réparés, modifiés, travaillés, dans l’objectif de l’adapter au temps, à la personne qui le porte… Bref, proposer un bijou qui dure.
La fantaisie : miser sur l’accessibilité
Quant à la fantaisie, c’est une toute autre histoire.
Les bijoux appelés “fantaisie” composent en réalité la majorité des bijoux que l’on voit : ce sont toutes les créations en plaqué or. Un plaquage qui se fait avec des intrants chimiques. Aujourd’hui, par abus de langage, on parlera de “bijouterie” pour cette catégorie de bijoux.
Le bijou fantaisie a émergé surtout dans les années 70, en même temps que le prêt-à-porter. L’objectif de la fantaisie était de rendre accessible ces bijoux. Et puis, ça avait du sens parce que les créations étaient telles que l’équivalent en joaillerie aurait été inabordable. Par exemple, une manchette en or serait impensable à réaliser en termes de coût, de densité des métaux qui apportent du poids au bijou.
Mais le bijou fantaisie, c’est aussi le bijou de courte durée : celui qu’on ne pourra pas réparer, celui dont le plaquage va s’estomper, celui qui n’est pas destiné à une transmission. Attention cela dit : “fantaisie” ne veut pas forcément dire “mauvaise qualité”. Il peut y avoir de la fantaisie très bien faite et qui va durer longtemps. Je vous invite à vous abonner à mon compte Instagram pour être au courant du prochain article : celui-ci comportera une sélection de marques de bijoux éthiques.
Et les pépettes dans tout ça ?
C’est bien de connaître les deux types de bijouterie. C’est encore mieux de comprendre pourquoi les prix peuvent autant varier.
D’abord, sachez qu’un lingot d’argent coûte aujourd’hui 800€, tandis qu’un lingot d’or du même poids coûte environ 54 000€. Rien que de savoir cela, cela nous permet de comprendre pourquoi l’argent est plus accessible que l’or ; ainsi que pourquoi les marques de bijoux fantaisie proposent souvent des bijoux en argent ou en plaqué or (et non en or en tant que métal).
Ok, c’est cool de savoir ça… Mais que dit-on des marques de fantaisie ? Il y a une différence parfois effarante : ça peut aller d’une dizaine d’euros à plus de 300€ (voire même beaucoup plus). En réalité, ce qui va participer au prix c’est le pays de fabrication, le travail en atelier (littéralement, les heures de travail en atelier) et la marque (la renommée du créateur).
Bon, on sait différencier les deux types de bijouterie et on comprend mieux les variations de prix des bijoux. Mais que sait-on réellement de l’or ?
Mieux comprendre la fabrication des bijoux en or
En France, l’or 18 carats est le plus connu et le plus courant dans la joaillerie.
C’est le nom de l’alliage d’or dans lequel il y a 75% d’or. L’or est alors mélangé avec de l’argent (pour réaliser de l’or gris), du cuivre (pour l’or rose) ou encore du bronze : ce sont ces alliages qui vont déterminer la couleur finale du bijou. Et vous vous en doutez certainement… C’est avant tout une question de mode !
L’or rose actuel n’est pas de la même teinte que l’or rose des années 80. Quant à l’or jaune, il peut aussi avoir des teintes différentes en fonction du fondeur et du pays de fabrication.
L’or diffère d’un pays à l’autre
Cette exigence française pour l’or 18 carats n’est pas internationale. Selon les pays, les alliages d’or seront plus ou moins purs. Au Portugal, il est plus courant d’utiliser de l’or 19 carats. Aux Etats-Unis, en Australie et en Nouvelle-Zélande, c’est l’or 14 carats qui prévaut : les bijoux sont plus légers mais plus résistants.
Toutefois, il n’est pas possible de réaliser des bijoux en or pur : trop fragile, trop lourd et étonnamment… trop malléable. Car oui, l’or est mou. Il arrive que des bijoux soient fabriqués avec un alliage d’or de 22 carats ou 24 carats, notamment en Inde et au Maghreb : ce sont des bijoux très lourds, souvent martelés. Il s’agit presque d’orfèvrerie. Le travail en finesse sur des bijoux de 22 carats ou 24 carats n’est pas possible.
Le marketing de l’or
Plus récemment, avec la flambée du cours de l’or, l’alliage à 9 carats s’est développé : des bijoux dans lesquels il n’y a que 38% d’or, ce qui n’est donc pas considéré comme de l’or étant donné que cette matière première est moins présente que les autres. Le 9 carats est – tout comme les bijoux fabriqués en France à 20€ – une opération marketing.
Cet or 9 carats fait polémique dans le monde de la bijouterie : beaucoup de marques vont vendre des bijoux en or, à des prix défiants toute concurrence. Ils ne vont pas dire très ouvertement que c’est du 9 carats et s’appuient sur le manque d’informations pour séduire leur clientèle.
Maintenant qu’on sait tout ça, une question persiste : tout cet or, il vient d’où ?
Mieux comprendre d’où viennent l’or, les diamants et les pierres précieuses
Le cas de l’or
Pour faire très simple : l’or est apparu sur Terre grâce à des météorites mais s’est aussi constitué en même temps que la Terre. C’est ainsi qu’on trouve des gisements d’or sur Terre et sous terre : il s’agit d’une matière naturellement présente sur notre planète.
C’est au fil de l’érosion que l’or sur Terre va être découvert : on appelle cela des gisements secondaires. Quant aux gisements primaires, ils sont découverts en creusant : les fameuses “mines d’or”.
Les gisements secondaires n’existent quasiment plus. Les gisements primaires ont été quasiment tous découverts, même ceux sous l’Antarctique (qui n’ont pas été exploités et on espère qu’ils ne le seront pas !).
Ces deux types de gisements sont exploités de manière très différentes :
- Les gisements primaires sont une catastrophe environnementale : ils bousculent complètement les écosystèmes présents. Ils sont exploités par des industriels du secteur dont l’exploitation est très encadrée et automatisée. Evidemment, ces acteurs n’ont que très peu de considération pour la planète. Toutefois, les réglementations existantes font qu’ils agissent dans un cadre strict, notamment sur les plans sanitaires et sociaux.
- Le cas des gisements secondaires est très différent : ils peuvent être exploités de manière artisanale. Il n’y a donc pas ou très peu de réglementation : pas de recyclage du mercure (qui permet de repérer/séparer l’or du reste des matières), pas de protections des travailleurs contre les matières toxiques, pas de contrôle sur la toxicité des rivières, etc. Souvent, cela concerne les populations des régions très pauvres.
Sur le marché de l’or, 90% vient d’une extraction industrielle et 10% de méthodes artisanales. Lorsque l’on parle de main d’œuvre, le ratio s’inverse : 90% de la main d’œuvre qui fait 10% de l’exploitation.
Plus précisément, il s’agit de 15 millions de mineurs artisanaux et au total 60 millions de personnes touchées directement par les mines artisanales en termes d’impact sanitaire.
Le cas du diamant
Aujourd’hui, il n’existe plus de gisement secondaire de diamants car ils ont tous été trouvés. C’était principalement dans les régions volcaniques : l’érosion est telle que tout a été découvert peu à peu. Toutefois, il peut y avoir des gisements secondaires aux abords des gisements primaires (exploités à 99% par des industriels) et c’est un gros problème car les abords sont exploités par des braconniers du diamant. Pour mieux comprendre le problème je vous invite à regarder Blood Diamond. Le secteur du diamant manque cruellement de transparence et nourrit beaucoup de fantasmes. La société De Beers, qui a constitué les fondements du marché du diamant a été très secouée par le film de Edward Zwick.
Aujourd’hui les principales extractions de diamants se font en Afrique du Sud, au Botswana, en Russie, au Canada. Les sociétés minières contractualisent avec les états pour exploiter les mines de diamants. Elles exploitent une partie pour l’état concerné, en reversant des fonds et l’autre en vue de la revente à l’international. Les répercussions économiques peuvent ainsi être très positives, comme au Botswana : l’un des pays les plus prospères en Afrique subsaharienne, grâce à l’extraction des diamants.
Bon, vous vous en doutez, c’est loin d’être tout beau, tout rose : pour extraire 1 carat de diamant, il faut 2 tonnes de minerai. L’impact écologique est donc très important. Pour des pays comme le Botswana, c’est une vraie ressource économique à part entière, dans un pays qui n’a pas tant de ressources.
Le cas des pierres de couleurs
Parmi les pierres de couleurs, il y a l’émeraude, le saphir, le rubis, etc.
On revient sur ce principe de gisements secondaires et primaires : la majorité des pierres viennent de gisements secondaires et sont artisanales. L’impact écologique est nettement moins important que pour l’or ou le diamant : il n’y a pas besoin de beaucoup de mercure, de cyanure et d’eau. M’enfin, ça reste quand même pas joli-joli. La revente des pierres est aussi une monnaie d’échange très importante pour certaines populations dont les ressources sont limitées. Ces pierres voyagent en majorité jusqu’en Inde, à Hong Kong ou au Sri Lanka en vue d’être taillées par les lapidaires. Le nord de l’Inde concentre 80% des tailleurs de pierre au monde. C’est une vraie spécialité culturelle. Ils sont ensuite revendus sur des marchés occidentaux et asiatiques. Nan mais imaginez l’impact écologique !
Le problème de l’extraction des pierres est avant tout un problème politique et social. Au Mozambique, une société minière s’est installée en tant que société mixte (nationale et privée). Des permis d’exploitations ont été vendus aux populations alentour. Mais ces permis constituent en réalité une forme d’esclavage moderne puisqu’ils sont vendus à crédit sans que les travailleurs ne puissent les rembourser. Sachant que cette situation est réglementée… Imaginez ce qu’il se passe dans les exploitations non réglementées !
“Le rubis au Mozambique c’est vraiment moyen. Le problème c’est que c’est environ 80% de la production mondiale.”
Bref : les pierres de couleur, c’est vraiment le chaos. C’est le type d’exploitation le moins encadré et dont l’impact sur les populations en termes économiques est très important.
Et la traçabilité dans tout ça ?
Il est difficile de garantir une provenance de l’or, des diamants et des pierres de couleur.
Certains gemmologues ou lapidaires vont acheter leur pierre au sortir de la mine et ainsi assurer une traçabilité de celle-ci, mais vous vous en doutez : ça reste très rare. La majorité des vendeurs de pierres n’ont aucune idée de la provenance de celles-ci.
Pour les diamants, la situation a récemment évolué : Tiffany a mis en place un traçage de ses pierres et le Canada a désormais son propre label.
L’or, c’est pareil – voire pire : la traçabilité de l’or est quasiment impossible puisque la matière est fondue et mélangée à d’autres en vue de la fabrication d’un bijou ou tout autre objet. On retiendra aussi que tous les « petits éléments » (fermoir, boucles, etc) sont souvent produits par des fournisseurs externes et dans ce cas, la traçabilité reste particulièrement difficile.
Toutefois, des solutions existent…
Les solutions pour une bijouterie plus éthique
Le label FairMined
Le label FairMined est un label indépendant. Il vise à garantir une exploitation consciencieuse envers les humains et la planète : salaire décent, pas d’enfants travailleurs, pas de mise en danger des travailleurs, parité salariale, retraitement des déchets, pas de rejets de mercure dans la nature. L’objectif était de préserver les populations aux abords des rivières qui étaient polluées par les rejets de mercure dans les rivières.
L’or extrait de ces mines est rendu traçable grâce à la technologie blockchain. Même dans la fonte, l’or FairMined sera séparé du reste. Il ne rejoindra jamais le circuit traditionnel, ce qui lui vaut un coût trois fois plus élevé, en plus d’une consommation énergétique importante. La rentabilité et l’impact écologique restent peu disruptifs. Cela dit, le FairMined donne un exemple de ce qui peut être fait de mieux aujourd’hui.
Le label Responsible Jewelry Council
Le Responsible Jewellery Council est également un label indépendant. Il a été mis en place par les acteurs du marché. Il touche la chaîne d’approvisionnement, dans sa globalité : labelliser l’or, le diamant, la pierre de couleur, de la mine à l’atelier. C’est un label aujourd’hui très courant.
L’or recyclé
La solution vraiment écologique et éthique résiderait dans l’or recyclé : il n’y a pas d’exploitation minière à la base de la chaîne puisqu’il s’agit d’or déjà en circulation. Si on se remémore le début de cet article : l’or est recyclable à l’infini ! Il y a d’ailleurs, plus d’or en circulation qu’on en trouvera plus jamais sous terre. On peut le revendre, l’échanger, le fondre… C’est vraiment une monnaie !
Toutefois, le problème de traçabilité de la chaîne persiste : l’or recyclé est fondu avec le reste. Le séparer du reste pour garantir un or 100% recyclé reviendra à augmenter le coût du produit de manière importante, tout comme pour l’or FairMined. Instaurer une maîtrise de la chaîne de production serait toutefois bienvenu.
Le diamant de synthèse
Le diamant de synthèse a la même composition physique, chimique et optique que le diamant classique, mais c’est fabriqué en laboratoire. Ce procédé existe depuis longtemps pour les saphirs, les émeraudes.
Un problème persiste (sinon, c’est pas drôle) : la demande mondiale de diamants est telle que de remplacer l’intégralité de l’extraction des diamants par des diamants de synthèse demanderait une énergie monumentale. Et n’oublions pas… L’extraction des diamants implique des millions de personnes qui dépendent de cela pour subsister à leurs besoins. Le diamant fait aussi sa renommée autour de son mythe : il a mis des milliards d’années à devenir ce qu’il est. C’est ça aussi qui lui apporte cette valeur.
Dans tous les cas, il s’agit quand même d’exploiter l’environnement pour obtenir des espaces et des ressources énormes : les diamants de synthèse sont très énergivores.
La nécessité d’une transparence
On l’aura compris : le secteur de la bijouterie n’est pas là pour sauver la planète. Toutefois, des solutions existent pour limiter son impact négatif sur celle-ci.
Malgré tout, la désinformation et le manque de transparence participent à tromper la clientèle. C’est typiquement ce qui est arrivé avec la marque Lou.Yétu qui indique fabriquer en France des bijoux à 20€, alors que c’est littéralement impossible de fabriquer un truc en France pour le vendre à ce prix là.
Un autre élément alarmant : le processus de Kimberley créé en 1995 garantit la provenance des diamants hors zones contrôlées par des groupes armés (suite aux problèmes politiques en Sierra Léone). Toutefois, des bijouteries affirment être éthiques sous prétexte que leurs bijoux sont issus du processus Kimberley et que leur chaîne d’approvisionnement est labellisée Responsible Jewellery Council. Alors qu’en fait, c’est le minimum. Tenir un discours de bijouterie éthique quand tu as juste le minimum, c’est de la désinformation.
Comment savoir si une bijouterie est éthique ou pas ?
Il faut prendre en compte que les matières utilisées en bijouterie sont convoitées depuis la nuit des temps, par toutes les civilisations, toutes les populations. Des matières qui vont provoquer des guerres, des envies. Des matières autour desquelles il y a un mythe et un engouement. Il y a aussi beaucoup d’argent en jeu, ainsi, ça reste encore difficile à contrôler, à réguler. Ça a toujours été comme ça. Ça le sera probablement tout le temps.
Malgré tout, en tant que consommateur.rice de bijouterie, il est possible d’avoir des clés pour faire des choix plus conscients. J’espère que cet article vous en aura donné plusieurs. Pour le conclure, je vous propose un petit “guide pour savoir si une bijouterie a une approche éthique ou pas” :
- Savoir où les bijoux sont fabriqués. C’est la première chose à demander, mais il ne faut pas s’arrêter là. L’exemple de la marque qui prend les gens pour des cons, c’est celui de Lou.Yetu déclarant “fabriqué en France” alors qu’en réalité, seulement 5% de ses bijoux sont fabriqués en France. Il faut creuser : où sont situés les ateliers, qui fabrique les pièces, qui assemble les pièces, etc. Une fabrication française prouvée est la garantie de standards stricts.
Le problème, c’est qu’en bijouterie tout semble très flou voire opaque. J’ai passé plusieurs heures à chercher à comprendre les réglementations et à ne pas savoir que vous écrire ici. C’est ainsi qu’une marque comme Lou.Yetu a profité de ce manque total de transparence du secteur. Le mieux reste encore de se fier à une marque qui a son propre atelier et qui saura vous le prouver.
- Choisir des marques dont la fabrication est la plus locale et la plus artisanale possible : des pièces fabriquées à la main, si possible par le/la créateur.rice. Plus la fabrication est artisanale, moins il y aura de pièces parce que cela prendra plus de temps.
- Comprendre la chaîne de fabrication : qui est fait par qui, par où et comment ? Il faut privilégier les créateur.rice.s qui savent répondre à tous ces points.
- Vérifier si les bijoux sont labellisés Responsible Jewellery Council
- Pour l’or recyclé, demander par qui l’or est fondu : en particulier si c’est une marque dont le discours marketing est centré sur le recyclage de l’or. D’où vient l’or ? De la clientèle ? Ont-ils leur propre fonderie ?
- Comparer les prix et les chiffres de l’entreprise (merci à la créatrice de Bleu Tango pour cette partie chiffrée) : combien coûte le bijou, quel est le chiffre d’affaires de l’entreprise, combien coûte la fabrication du bijou. Attention cependant à savoir si une marque a son propre atelier ou non. Si c’est le cas, elle pourra vendre à d’autres ateliers, ce qui augmentera son chiffre d’affaires.
Exemple concret : un bijou Lou.Yetu à 20€ TTC.
On enlève la TVA = 18,33 – on divise par 5 = environ 3€ de coût de revient.
Donc ça a coûté trois euros d’acheter la matière, de l’assembler en France (je rappelle le SMIC horaire 10,25€) et de le dorer ? Pas possible.
Regardons ensuite les ventes de la marche : environ 6 millions d’euros (chiffres d’il y a deux ans vu qu’ils ne respectent pas leur obligation de publier les chiffres). Et ils annoncent sur leur site 13 personnes qui fabriquent les bijoux. Calculons dans nos têtes combien ça fait de bijoux « fabriqués » par 13 personnes en un an, et rigolons ensemble !
On calcule mentalement la marge et le coût de revient quand on achète un bijou, et on se demande si le coût de revient peut faire passer 20mn, 30mn ou 1h ou 2h au SMIC horaire d’un travailleur français, et on en tire des conclusions.
De même, on cherche le chiffre d’affaires de l’entreprise, on cherche le nombre de travailleurs dans la marque (la masse salariale par exemple) et on calcule si le travail peut être fait par ces personnes…ou si ça devient évident que le travail n’est pas fait en France…
Dernière astuce :
Pour savoir si une marque fait une marge entre 2 et 5 fois le prix, ou si elle fait une marge entre 5 et 10 fois le prix , on regarde les soldes : moins de 30% de soldes ou pas de soldes ? Marge entre 2 et 5. Plus de 30%, des codes de réduction à foison, des ventes privées, des archives, des braderies et tous leurs nouveaux mots ? Marge entre 5 et 10 !
- Miser sur les marques qui font preuve de transparence : finalement, tout se rejoint ici. A partir du moment où une marque communique clairement sur les étapes de fabrications, sur les ateliers avec lesquels elle travaille, sur ses collections, sur ses prix, qu’elle partage aussi des photos de la fabrication, des vidéos, etc… En bref, toutes les preuves qui montrent sa transparence, eh bien c’est que vous pouvez vous y fier. Mais bien entendu, cela demande de prendre le temps de poser les questions si besoin.
L’exemple de Diamantissimo, une joaillerie familiale
Un immense merci à Fanny et Pierre de m’avoir ouvert les portes de leur bijouterie-joaillerie : nous avons échangé pendant plus de deux heures sur ce sujet si complexe de l’éthique en bijouterie. Grâce à eux, j’ai appris énormément de choses sur ce secteur, que j’espère vous avoir transmis au mieux.
Pour répondre à la question que je pose dans cet article : la bijouterie vraiment éthique existe. Mais celle-ci n’est pas destinée à toutes les bourses : son coût sera nécessairement bien plus élevé qu’un bijou non éthique – tout comme un tee-shirt d’une marque responsable coûtera 10 fois plus cher qu’un tee-shirt H&M. Pour l’heure, la chose probablement la plus éthique à faire dans ce secteur si particulier, c’est d’être transparent. Et c’est sur cette transparence que Pierre, héritier de Diamantissimo mise.
“Aujourd’hui, on n’afficherait jamais bijouterie éthique sur notre façade parce que ça serait mensonger. Le mieux que l’on puisse faire c’est d’être transparent.”
Une bijouterie avant-gardiste
Cette bijouterie-joaillerie familiale installée au 28 rue du Four a vu le jour en 1920. C’est l’arrière-grand-mère de Pierre qui a créé Diamantissimo : à l’époque, une femme entrepreneuse qui monte ça seule, c’était exceptionnel ! En 1969, la grand-mère de Pierre a repris cette bijouterie et fondé la marque Diamantissimo. C’était dans un esprit novateur, post 68 : avec une envie de casser les codes de la bijouterie traditionnelle, de créer une vraie expérience client, de raconter l’histoire du bijou. Il y a les créations de la maison, mais aussi une mise en avant de créateurs indépendants, peu connus. C’est une sorte d’incubateur de bijoutiers finalement, puisque Diamantissimo les aide à se lancer, leur apporte des connaissances sur le marché et surtout leur offre une place en vitrine. C’est toujours le fonctionnement actuel.
Aujourd’hui, Pierre ne travaille qu’avec des pierres précieuses et de l’or 18 carats. La boutique propose aussi un service de réparation et d’entretien. Diamantissimo veille aussi à être la plus transparente possible : en informant sa clientèle, en travaillant avec des ateliers, des lapidaires soigneusement sélectionnés, avec des matériaux labellisés RJC.
Donc si vous passez dans le quartier latin, n’oubliez pas de vous rendre dans cette boutique pour admirer ce qui est fait : vous pourrez en profiter pour poser toutes vos questions aux équipes !
Diamantissimo se trouve au 28 rue du Four dans le 6ème arrondissement. La boutique est ouverte du lundi au samedi, de 11h à 19h. Retrouvez toutes les infos sur le site internet de la marque.
xoxo
Elena sans H
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